En regardant la situation de l’enseignement du combat à
notre époque je constate qu’elle cadre exactement avec la société de
consommation dans laquelle nous vivons, nous voulons tout et tout de suite, il
faut consommer encore et encore, et obtenir le résultat le plus vite possible,
« devenir un combattant en un an, voir une semaine » ,
« devenir instructeur en deux semaines » etc. Les systèmes de combat
y compris les plus élaborés, sont devenus des produits de consommation, et nous
avons face à nous des consommateurs à qui nous vendons un produit. Pour vendre
le produit nous avons recours à des méthodes de marketing, de communication
etc. Inévitablement lorsque nous avons à
convaincre « que la mienne est plus grosse que la tienne » nous
mentons, car le jeu est là, nous sommes en compétition avec le système voisin,
avec la fédération voisine, alors nous nous arrangeons avec la réalité, un
service militaire classique va devenir un engagement dans les commandos, une
méthode de combat classique servant au conditionnement des soldats va devenir
une méthode secrète, une embrouille à châtelet devient un combat héroïque etc.
Ajoutez à cette situation l’argent et vous avez face à vous une belle industrie
qui engrange des millions d’euros chaque année, car il faut bien le dire le
bisness des arts martiaux, des sports de combats, des systèmes de défense est
très lucratif, vous y trouvez des
chaines de télé, une industrie du textile, une presse spécialisée etc. Je choque lors de mes conférences lorsque
j’explique que pousser la porte d’un club est un acte d’achat, et que le
professeur est là pour te vendre un produit, en général les gens sont d’accord
mais jamais chez eux, toujours chez les autres, pourtant je pense qu’il ‘n
existe plus de système qui échappe à cela, le bisness est roi au pays du
combat. Ceci étant, il y a chez les commerçants des gens très bien, honnêtes,
qui te vendront le meilleur produit possible, il y en a certainement sur le
forum, il ne te vendront pas une fiat en t’expliquant qu’elle est capable de
rivaliser avec une Ferrari sur un circuit. Pour autant, l’arrivée et le
développement du bisness est-il de nature à nuire à l’efficacité des méthodes
et systèmes de combat ? Personnellement je pense que oui, car très
clairement nous allons vers une monoculture des systèmes de combat, je n’ai pas
le temps de développer mais réfléchissez bien et regardez autour de vous avant
de beugler et d’affirmer qu’il existe des arts dans tout les pays, regardez
objectivement, je vous assure qu’il y a
de quoi avoir peur, car les systèmes de combat dominant ne sont pas forcement
les plus efficaces mais les plus rentables, y compris en terme de domestication
de l’espèce.
Actuellement je ne connais pas un système sur le marché
(mais je ne connais pas tout) qui puisse former un individu au combat défensif de
survie. La plupart des méthodes sont dérivées de combat rituel et les
modifications apportées pour en faire des méthodes de « combat de rue »
n’y change rien. Très souvent nous avons des adaptations de méthodes
existantes, avec des trucs en plus, style
attaque aux yeux, aux parties génitales etc. Le fameux « chez nous
y a pas de règles » etc. Ceci est utile bien entendu je ne vais pas dire
le contraire je l’enseigne aussi. Lorsque nous expliquons cela à nos clients,
nous vendons notre produit sans la note explicative ou plutôt avec un mode
d’emploi erroné qui correspond au fonctionnement de la machine du prof et de la
méthode, au client de se mouler, d’être formé ( du latin formare, prendre forme
) de devenir un pratiquant de judo, de krav, de self , de boxe…… , voilà un
mensonge, une incompétence responsable mais pas coupable de la part de profs
qui ne sont tout simplement formés pour vendre le produit et qui sont dans la
grande majorité des gens honnêtes croyant rendre service . Le style prime sur l’humain,
voici la première erreur à mon avis. Cela ne signifie nullement qu’une personne
entrainée de cette façon ne puisse pas se sortir d’une situation difficile,
mais le gars qui va se sortir de la merde devant un problème le fera plus grâce
à des capacités personnelles qu’à la pratique d’une méthode commerciale, il y a
fort à penser qu’il s’en serait sorti sans cela de toute façon. Les méthodes
forment des hémiplégiques aux capacités limitées à la pratique, dans presque
tout les cas observés les capacités diminuent lors de l’arrêt ou de la baisse
de l’activité de combat. Le combat défensif
de survie est affaire de métissage et de développement des capacités
individuelles et naturelles durable.
La préparation d’un
individu au combat défensif de survie visant à faire face à une agression,
concerne l’individu tout entier dans son conscient, son inconscient, et en
fonction de tout les critères de l’instant, il ne s’agit plus de former (faire
prendre forme) , d’ instruire, d’éduquer, mais d’ enseigner , et nous sommes là
dans un autre registre car enseigner (du latin insignare) signifie signaler,
désigner , l’approche est différente, l’ enseignent doit être aussi un
pédagogue. Je ne parle pas ici de la pédagogie de l’éducation nationale, je
parle du véritable sens du mot en grec ancien ou le pédagogue était l’esclave
qui accompagnait un enfant lors de son éducation, là encore le sens est
important. Un enseignant désigne et accompagne voilà la première règle établie, désigner et accompagner est un
rapport personnel et humain entre deux individus, un échange fait d’humanité,
de compréhension, de complicité et de confiance basé sur l’honnêté, le
désintéressement matériel et surtout l’ entraide. Il pense impossible
d’accompagner 50 personnes 3 fois deux heures par semaines, car accompagner
implique de marcher à coté, pas faire face comme nous le faisons dans nos
cours. Lorsque j’accompagne je vois les mêmes choses que mon élève, cela
facilite la désignation des problèmes, lorsque je suis face à lui je ne vois
rien de ce qui le concerne. Par ailleurs
l’enseignement ne doit pas se limiter au combat bien entendu, il faut aborder
le fonctionnement de l’individu, de l’espèce, aborder le corps, ouvrir l’esprit
par la philosophie, le laisser découvrir, faire des erreurs, etc. Nous sommes là dans un enseignement de
vie durable qui implique le combat défensif, contre toutes les agressions,
aussi bien psycho-sociales que physiques, cela prends du temps, mais la
richesse de l’échange est énorme.
Pour ne prendre que le combat, nous travaillons dans un premier
temps sur le désapprentissage avec un axe, désapprendre, prendre, apprendre,
comprendre avec des résultats au-delà de nos expériences, si un jour j’ai le
temps je passe vous expliquer cela en détail, mais suis déjà à la bourre. Les réflexions ci après sont personnelles, elles
ne constituent pas une vérité, en combat défensif de survie la vérité n’existe
que pour un individu donné, dans un environnement donné, dans un espace temps
donné, les secondes passées, sont passés…… mais la rencontre de deux individus
en situation réelle qui s’opposent en mouvement dans une situation donnée n’est
pas neutre, cette rencontre est créatrice d’autre chose, d’une nouvelle forme,
d’une autre masse, qu’un enseignent doit
capter, comprendre, et restituer pour faire évoluer son élève.
Bien à vous
JL